Intelligence économique & stratégique - Stratégie d'innovation

l y a quelques jours, LesEchos.fr a ouvert une tribune à une avocate, Béatrice Lerat, qui a partagé avec nous quelques considérations intéressantes sur la protection du patrimoine immatériel des entreprises, en axant sa réflexion principalement sur les contrats (http://tinyurl.com/mdn93p3). Elle nous rappelle ainsi que le patrimoine immatériel de l'entreprise se compose de 3 dimensions:

• les actifs technologiques, qui sont au coeur de la production

• les techniques commerciales, les informations de compréhension et de connaissance des marchés et des clients

• le capital organisationnel et relationnel, y compris les hommes

A une extrémité, celle où l'IS et l'IE se rejoignent, l'intelligence stratégique peut se définir par rapport aux outils et aux actions à mettre en oeuvre dans le cadre des 3 piliers  (collecte, protection et lobby). A une autre extrémité, on peut envisager l'IS comme l'ensemble des outils et méthodes de gestion de l'information (et des connaissances - collecte, partage, protection, exploitation...) qui viennent en support des stratégies qui visent à l'amélioration des performances (compétitivité) de l'entreprise. Et là, on touche à d'autres métiers de conseil. Cette vision ouvre largement la porte à de nouveaux outils et de nouvelles pratiques et permet d'envisager la délégation de tâches et responsabilités comme outil et méthode d'intelligence stratégique.
Les billets de Effi-Man, publiés sous le titre commun "Pourquoi est-il si difficile de déléguer pour un dirigeant de PME?", nous montrent effectivement que la délégation est un vecteur de compétitivité, d'innovation, de gestion des connaissances. Par exemple:

• la difficulté à déléguer est souvent guidée par la peur et, souvent, cette peur rogne également les ailes de tous les collaborateurs;  à contrario, la délégation va booster la performance de ceux en qui on investit de la confiance

• la délégation permet de raccourcir les chaînes de décisions, ce qui est de nature à favoriser la compétitivité de l'entreprise en réduisant certains surcoûts administratifs, en augmentant l'agilité de l'entreprise, en facilitant l'innovation (permanente)...

• une bonne délégation doit aller au-delà du simple transfert de tâches et de responsabilités en s'inscrivant dans une dynamique de partage de savoirs, de connaissances et de compétences (pour rendre les délégataires vraiment autonomes)

Cette dernière vision de l'intelligence stratégique me plait et c'est celle dans laquelle j'essaie de développer mes activités. Jusqu'au prochaines évolutions de ma compréhension et mon point de vue.

Finalement, rien de très révolutionnaire, ni de vraiment coûteux. Mais des attitudes encore trop peu présentes dans un grand nombre de PME qui n'ont pas pris consciences qu'elles ont des informations à protéger (stratégie, savoir-faire, fonctionnement interne...). Pour ces dernières, le premier pas devrait être une réflexion et une cartographie de l'information dont elles disposent, qu'elles créent ou qu'elles manipulent.

Ainsi, le terme "intelligence économique", surtout utilisé en France, recouvre à la fois les actions menées par les autorités (semi-)publiques visant à promouvoir et défendre les entreprises nationales et les pratiques propres aux entreprises pour assurer leur compétitivité. Le terme "intelligence stratégique" a été choisi par l'autorité publique wallonne pour nommer les actions publiques d'aides proposées aux PME autour des trois "piliers" (collecte d'information, protection du capital immatériel, influence et lobby). L'IS wallonne se focalise sur l'entreprise (et sa stratégie) et pas sur les actions de la force publique (espionnage/contre-espionnage, défense de secteurs/entreprises stratégiques...). Notons au passage que l'intelligence économique (française) se revendique également de ces trois piliers. De son côté, le terme "competitive intelligence" est surtout appliqué aux activités (spontanées?) menées par les entreprises américaines pour mieux connaître leurs concurrents.

Dans le cas de l'entreprise Audrey-Biobeauty (http://www.audrey-biobeauty.be/), la démarche d'intelligence stratégique a identifié deux domines prioritaires:

• la surveillance du marché et de ses acteurs

• la proximité avec les clients (extension de la présence et de la visibilité sur le Web et dans les réseaux sociaux)

Et tant que vous êtes dans le CCI Mag, profitez de l'occasion pour jeter un oeil sur l'intéressant dossier consacré à la réussite des relations avec la presse (p.33).

Ce qui positionne les normes comme outil d'intelligence stratégique c'est que les normes se créent sur base volontaire. Ce sont les entreprises ou les fédérations qui prennent l'initiative de créer les normes. On comprend donc bien que ceux qui s'attèlent à une telle tâche le font avec un arrière pensée, souvent la création ou la conservation d'un avantage compétitif basé sur un différentiel de technologies ou de pratiques. Surtout lorsqu'après des actions de lobby réussissent à imposer le respect des normes. Toutes les entreprises peuvent participer aux travaux préparatoires des normes, même les petites. Bien sûr, il faut y consacrer des ressources, mais c'est une excellente opportunité pour imposer dans la norme ce que l'entreprise fait bien (mieux), pour anticiper les effets futurs de la norme ou pour découvrir de nouvelles technologies.

En raison de leurs tailles, ces entreprises peuvent souvent se contenter d'actions de "intelligence stratégique" intuitives et en général bien maîtrisées par les dirigeants d'entreprise. Et dans cette perspective, la mise en oeuvre consciente d'une politique d'IS et de ses outils n'apporte pas grand chose aux entrepreneurs qui n'ont pas envie de grandir et qui préfèrent rester dans leur zone de confort et de rentabilité (et il y en a un certain nombre). Une des difficultés des programmes publics d'aide à l'implémentation de l'IS en PME est alors de bien définir leurs objectifs et stratégies et de bien choisir les entrepreneurs qui utiliseront vraiment l'IS nouvellement acquise comme levier de croissance ou de pérennité de leur entreprise.