Le mythe du management scientifique a disparu, mais le monde industriel continue à survaloriser les méthodes standardisées venues de l’extérieur, au détriment des solutions souvent inventives développées à l’intérieur des entreprises. La recherche et l’enseignement ne sont pas en reste, avec un goût prononcé pour la théorisation. N’est-il pas temps de changer d’approche ? Michel Berry, fondateur de l’Ecole de Paris du management, cultive depuis longtemps une attention à la singularité des situations. Mais comment partager l’intelligence du singulier ? Comment former, transmettre, échanger ? Envisager le management comme un art permet de dépasser ces contradictions, en ouvrant de nouvelles perspectives sur l’apprentissage et sur les critères de la réussite.
Cette culture, envisagée comme une méthode d’apprentissage, me semble essentielle. C’est l’un des enjeux de l’École de Paris, mais c’est aussi de cette manière que l’on pourrait appréhender les différents moments qui, au cours d’une vie, mettent un manager en présence d’expériences différentes – d’œuvres différentes, si l’on file la métaphore. Ces moments, ce sont par exemple les stages, et l’importance d’avoir un bon maître de stage est essentiel car c’est grâce à lui que vous pouvez saisir le sens et l’intérêt de ce que vous observez ; ce seront aussi les moments d’apprentissage qui se présentent au fil d’une carrière, quand elle est bien gérée.
Mais pour un manager, les occasions de se cultiver par l’expérience ne sont pas suffisamment nombreuses, ou plus exactement elles ne sont pas suffisamment variées. D’où l’importance d’une médiation, qui lui donne accès à d’autres expériences ; d’où aussi la nécessaire constitution d’une mémoire. Il y a cette formule bien connue des médecins : L’art est long et la vie est courte. C’est ainsi qu’on devrait envisager ce qu’on appelle aujourd’hui la « carrière » d’un manager : un apprentissage, long et varié, qui permet au fil du temps d’acquérir la culture, le savoir-faire, le coup d’œil auxquels on reconnaît un maître.