L’employeur ne peut remettre en cause par voie d’exception un accord collectif prorogeant les mandats des représentants du personnel qu’il a signé et appliqué sans réserves.
Dans cette affaire, par voie d’accords collectifs successifs, les mandats des représentants du personnel ont été prorogés à trois reprises le 24 juin 2004, puis le 16 septembre 2005 et enfin le 26 octobre 2006. Un salarié qui avait été élu membre du comité d’entreprise a été licencié le 22 juin 2007 et a signé une transaction le 9 juillet 2007. Contestant la rupture de son contrat de travail au motif que son employeur n’a pas respecté les règles du statut protecteur, le salarié a saisi la juridiction prud’homale en avril 2008 aux fins qu’il soit prononcé la nullité de son licenciement et de la transaction signée postérieurement. L’employeur se fondait sur le principe jurisprudentiel constant que « seul un accord unanime passé entre le chef d’entreprise et les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise peut différer le terme des mandats des délégués du personnel et des membres du comité d’entreprise dont le renouvellement doit avoir lieu à échéance ». Ainsi, l’employeur faisait valoir que le mandat de représentant au comité d’entreprise dont se prévalait le salarié n’était pas valable, dès lors que les dernières élections au comité d’entreprise de l’entreprise avaient eu lieu en 2002, et que le premier accord de prorogation du 24 juin 2004, prévoyant une prorogation jusqu’au 30 novembre 2005, n’avait pas été signé par toutes les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise. Par voie de conséquence, selon l’employeur, le salarié ne bénéficiait plus du statut protecteur lors de son licenciement.
Toutefois, la Cour de cassation ne suit pas cette argumentation. Les Hauts magistrats ont considéré que l’accord de prorogation signé répondait aux caractéristiques de l’accord collectif et que celui-ci ne pouvait pas être remis en cause par l’employeur qui l’avait signé et appliqué sans réserve. Pour la Cour, la prorogation était donc valable et le salarié aurait dû bénéficier de la procédure de protection. Cette position peut sembler surprenante au regard de sa jurisprudence constante. En effet, la prorogation ou prolongation du mandat des membres du comité d’entreprise est licite si elle résulte d’un accord de prorogation unanime entre l’employeur et les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise (Cass. soc., 13 juin 1989, n° 88-60.556). La Cour de cassation a réaffirmé régulièrement ce principe bien établi par des arrêts plus récents (Soc. 27 mai 1999, n° 98-60.327, Bull. civ. V, n° 241 ; 7 mai 2002, n° 00-60.390 ; 12 juill. 2006, n° 05-60.331 ; 12 mars 2003, n° 01-60.771, Bull. civ. V, n° 96 ; 13 juin 1990, n° 89-60.974 ; 26 juin 2013, n° 12-60.246, RDT 2013. 715, obs. I. Odoul-Asorey ; Dalloz actualité, 18 juill. 2013, obs. B. Ines ). Solution identique en matière de prorogation des mandats des représentants du personnel dans l’hypothèse d’un transfert d’entreprise (C. trav., art. L. 2314-28 et L. 2324-26).