Quel est le niveau de durabilité de l'exploitation des ressources naturelles mondiales au rythme actuel ? La question semble avoir été maintes fois posée dans les presses spécialisées et grand public ces dernières années. Mais peut-on seulement y répondre ? Pas d'après Peter Kareiva, l'un des directeurs de l'ONG environnementale The Nature Conservancy, reconnu comme l'un des écologistes américains les plus respectés [1-2]. En 2012, en co-signant un article intitulé Conservation in the Anthropocene, où il appelait notamment à une alliance entre les environnementalistes et les corporations, il avait secoué la planète de l'écologie aux Etats-Unis [3]. On l'avait au mieux dénoncé comme angélique, au pire soupçonné d'une connivence avec de grands groupes industriels américains.
L'alternative proposée a récemment pris le nom de Earth Genome Project. L'initiative en est à ses prémisses : le Natural Capital Project de Stanford en a pris la tête aux côtés de The Nature Conservancy, et cherche le soutien et l'implication de partenaires académiques, institutionnels et industriels. Google et Ernst & Young ont déjà confirmé leur intérêt et leur désir de faire partie de l'aventure. L'idée sous-jacente ? Rassembler un maximum de données sur les usages locaux des réserves en eau, la dégradation des sols, les émissions de gaz à effet de serre, etc. à travers le monde. Cela permettrait une modélisation à (très) grande échelle des services écosystémiques, mais également des applications au niveau d'un pays, d'une région, d'une ville ou d'un bassin versant. On comprend pourquoi Google est intéressé, le géant américain ayant notamment proposé de mettre à disposition les données disponibles dans Google Earth. Le développement de tels outils permettra notamment de déterminer si les réserves en eau d'une région approchent d'une limite critique, si un pâturage est trop intensif sur un paysage donné - le type de décision qu'il est impossible de prendre en s'appuyant sur la seule empreinte écologique.