Construction l'Information

Dans un entretien au Bulletin Européen du Moniteur, le président de la Commission économique et juridique de la Fédération de l’Industrie Européenne de la Construction, qui est également président d’Eiffage Construction Métallique, analyse le rapport annuel de statistiques publié cet été par la FIEC.

Selon le rapport annuel de statistiques de la FIEC, la production du BTP devrait enregistrer une baisse de 1,9% en 2012, après une hausse de 1,4% en 2011 ? Comment expliquer cette rechute ?

Globalement, cette tendance correspond à la fin des différents plans de relance mis en place dans toute l’Europe depuis 2008, et qui ont notamment favorisé les infrastructures et l’efficacité énergétique dans le logement. Mais il n’y a plus d’argent dans les caisses des États et les plans d’austérité visent davantage la construction publique que l’emploi des fonctionnaires, qui ne peuvent être mis au chômage… Autre problème : le financement des grands projets, qui ont de plus en plus de mal à se faire, notamment à cause du tarissement des investissements privés de long terme (cf. nouvelle réglementation bancaire Bâle III). Au final se dessinent deux Europe, celle du nord-ouest (Allemagne, France, Scandinavie…) qui continue d’aller plutôt bien, et celle du sud-est (Italie, Espagne, Portugal, Grèce, des pays d’Europe de l’Est et l’Irlande) qui est dans une situation parfois très grave. En Espagne, la chute a été d’une grande brutalité en raison de l’explosion de la bulle immobilière avant même la crise de 2008 ! Ceci dit, les autorités publiques prennent des mesures budgétaires drastiques et, d’autre part, les grands groupes de BTP espagnols ont aussi l’habitude d’aller chercher des marchés à l’étranger. En France, le secteur fléchit un peu, mais la situation n’est en rien comparable, notamment parce qu’il n’y a pas eu d’abus dans l’immobilier. L’Allemagne continue à se porter plutôt bien. Au Royaume-Uni, il y a eu un effet JO et le BTP va participer à un programme énergétique colossal.

Peut-on espérer que la baisse de la construction publique soit contrebalancée par un rebond du privé ?

Chaque fois que je fais une réunion économique à la FIEC, je constate que lorsqu’il y a un phénomène de relance dans le privé, il ne compense pas totalement la baisse dans le public et l’effet sur les entreprises dépend bien entendu de leurs activités. Mais la situation concernant l’accès au crédit et les in-vestissements privés est actuellement inquiétante, et plus encore en raison de nouvelles législations plus restrictives en cours d’adoption : Bâle III qui est en train d’être transposée par l’UE via la directive Capital Requirements IV ; la directive Solvabilité II qui va concerner les assureurs, habituellement investisseurs de long terme ; ainsi qu’une nouvelle directive sur les crédits hypothécaires.

Comment voyez-vous l’année à venir ?

De ce qui se dit dans nos réunions, je vois 2013 encore en légère récession par rapport à 2012. À partir de 2014, tout dépendra de la manière dont les États auront réglé la question des déficits. Il faut tout de même se préparer à quelques années de vaches maigres, plus particulièrement pour les entreprises qui ne sont pas en mesure d’aller sur les marchés internationaux.

Via Damoclès